Publié le
22/7/2025

gestion des déchets pour les établissements de santé

La gestion des déchets dans les établissements de santé est un domaine d'une complexité croissante et en perpétuelle évolution, guidé par une réglementation exigeante et une conscience environnementale de plus en plus marquée.

Gestion des déchets en établissements de santé : un enjeu stratégique et réglementaire

La gestion des déchets en établissements de santé et médico-sociaux est une problématique d'une complexité et d'une importance stratégique considérables, rigoureusement encadrée par la législation française. Loin de se limiter à une simple élimination, cette gestion englobe une série de principes fondamentaux qui visent à protéger la santé humaine et l'environnement, tout en favorisant l'adoption d'une démarche d'économie circulaire. Les professionnels de la santé, qu'ils exercent au sein de structures de soins, en hospitalisation à domicile, ou en cabinet libéral, génèrent un volume significatif de déchets de natures très diverses. Parmi ceux-ci, certains présentent des risques majeurs, qu'ils soient infectieux, chimiques, toxiques, radioactifs, ou mécaniques. La compréhension approfondie et l'application stricte des réglementations en vigueur sont donc impératives pour maîtriser ces risques à toutes les étapes de la filière d'élimination, depuis la production initiale jusqu'au traitement final. Cet article a pour objectif d'offrir une exploration exhaustive des obligations légales, des spécificités des différentes filières de déchets, des responsabilités incombant aux acteurs concernés, et des sanctions encourues en cas de non-conformité, afin de fournir une vision claire et complète des enjeux de la gestion des déchets dans le secteur de la santé.

Le cadre légal et les principes fondamentaux de la gestion des déchets

La gestion des déchets au sein des établissements de santé et médico-sociaux est intrinsèquement régie par un ensemble de dispositions législatives et réglementaires strictes, dont les piliers sont le Code de l'environnement et le Code de la santé publique. Conformément à l'article L541-1 du Code de l’environnement, un déchet est défini comme « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire ». Cette définition fondamentale sert de point de départ à l'ensemble des obligations qui incombent aux producteurs et détenteurs de déchets.

Les grands principes directeurs et la hiérarchie des modes de traitementLes établissements sont tenus d'organiser la gestion de leurs déchets en respectant une hiérarchie des modes de traitement clairement établie par la loi. Cette hiérarchie, détaillée notamment par l'article L541-1 II. 2° du Code de l'environnement, doit guider chaque décision en matière de gestion des déchets :

  • La prévention de la production de déchets : Cette approche est la priorité absolue. Elle vise à réduire la quantité de déchets produits ou à en limiter les effets nocifs dès la source. Pour les établissements de santé, cela peut se traduire par l'optimisation des pratiques, l'utilisation de matériaux durables ou la réduction des emballages.
  • La préparation en vue de la réutilisation : Cette étape consiste à préparer les produits pour un nouvel usage à l'identique avant qu'ils ne soient considérés comme des déchets. Il s'agit d'une composante essentielle de la prévention des déchets, comme le don de matériels médicaux non utilisés ou de repas non consommés.
  • Le recyclage : Ce processus implique la transformation des déchets en de nouvelles substances, matériaux ou produits. Le tri à la source est fondamental pour permettre le recyclage des différents flux.
  • Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique : Lorsque le recyclage n'est pas techniquement ou économiquement viable, cette étape consiste à récupérer de l'énergie à partir des déchets, par exemple via l'incinération avec valorisation énergétique.
  • L’élimination : Représentant le dernier recours, l'élimination concerne uniquement les déchets ultimes, c'est-à-dire ceux pour lesquels aucune forme de valorisation n'est possible.

Obligations environnementales et sanitaires fondamentalesAu-delà de cette hiérarchie, les établissements doivent organiser leur gestion des déchets de manière à limiter le transport des déchets, favorisant ainsi un principe de proximité essentiel pour réduire l'empreinte carbone et les risques liés à la logistique. Plus important encore, cette gestion doit impérativement être conforme aux principes de protection de la santé humaine et de l’environnement. Cela implique une vigilance constante pour:

  • Ne pas créer de risque pour les écosystèmes, qu'il s'agisse de l'eau, de l'air, du sol, de la faune ou de la flore. Toute défaillance pourrait avoir des conséquences environnementales et sanitaires désastreuses.
  • Ne pas causer de nuisances sonores ou olfactives, qui peuvent impacter la qualité de vie des riverains et du personnel.
  • Ne pas porter atteinte aux paysages et aux sites protégés, préservant ainsi le patrimoine naturel et culturel.
  • Ne pas entraîner de dégradations des lieux présentant un intérêt particulier, tels que les sites classés, les monuments naturels et les zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique ou floristique.

Ces exigences s'appliquent de manière universelle à tous les établissements de santé et médico-sociaux. Elles sont déjà en vigueur, et leur non-respect peut entraîner de nombreuses sanctions administratives ou pénales. Une gestion défaillante des déchets, comme des dépôts sauvages ou le recours à un organisme non agréé pour le traitement, peut être lourdement sanctionnée, avec des peines pouvant aller jusqu'à quatre ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende. Ces principes fondamentaux s'inscrivent pleinement dans une démarche globale de planification écologique du système de santé, visant à réduire son impact environnemental et à renforcer sa résilience face aux défis climatiques et à la raréfaction des ressources.

La traçabilité : un impératif pour une gestion transparente

La traçabilité des déchets représente une composante cruciale du cadre juridique de leur gestion au sein des établissements de santé et médico-sociaux. Elle constitue une garantie de surveillance continue, depuis le moment de la production du déchet jusqu'à son élimination finale, assurant ainsi une conformité rigoureuse avec l'ensemble des exigences réglementaires.

Obligations de tenue de registre chronologiqueLa législation impose aux établissements de maintenir et de conserver un registre chronologique de la traçabilité de leurs déchets pendant au moins trois ans. Cette obligation de traçabilité ne s'applique pas aux déchets qui sont collectés directement par le service public. Pour les déchets dangereux et les déchets POP (Polluants Organiques Persistants), l'article R541-43 du Code de l'environnement spécifie que les exploitants des établissements sont tenus de tenir à jour un registre détaillé. Ce registre doit consigner la production, l'expédition, la réception et le traitement de ces déchets, ainsi que les produits et matières issus de leur valorisation. La conservation de ce registre est impérative pour une durée minimale de trois ans.

Le rôle fondamental des Bordereaux de Suivi des Déchets (BSDD)Pour tous les déchets dangereux, l'émission d'un Bordereau de Suivi des Déchets (BSDD) est obligatoire à chaque collecte. Ce document est d'une importance capitale pour le suivi de toutes les opérations d'élimination et doit être systématiquement mis à la disposition des autorités administratives. Le BSDD doit contenir une multitude d'informations précises et détaillées, incluant le code du déchet, la quantité (réelle ou estimée en tonnes), l'origine du déchet (adresse, SIRET), le numéro de certificat d'acceptation préalable, une description claire de l'opération, le nombre de colis par type de conditionnement, le nombre total de colis, l'adresse du lieu de collecte, et la mention éventuelle de la présence de déchets POP. Lors de son émission par l'établissement producteur, des informations complémentaires concernant l'émetteur du bordereau, la nature, le conditionnement et la quantité des déchets, leur origine précise, ainsi que l'installation de destination (avec des précisions si un éco-organisme ou un négociant/courtier est impliqué) doivent également être renseignées.

La dématérialisation et l'avènement de la plateforme TrackdéchetsLa réglementation a évolué de manière significative pour rendre obligatoire la dématérialisation du BSDD et du registre de traçabilité pour certaines catégories de déchets. La plateforme Trackdéchets est l'outil numérique central et incontournable pour cette déclaration obligatoire. Elle permet de déclarer de manière simplifiée et sécurisée le suivi des déchets dangereux, de l’amiante, des véhicules hors d’usage et des fluides frigorigènes à chaque collecte. Pour les déchets contenant de l'amiante, le BSDD peut être émis par le maître d'ouvrage (l'établissement), l'entreprise réalisant les travaux, la déchetterie ou le détenteur, avec l'exigence de spécifier des informations relatives aux numéros des scellés, à la consistance et au conditionnement des déchets, ainsi qu'aux opérations de travaux menées. Concernant les fluides frigorigènes, depuis le 1er janvier 2023, l'émetteur peut être le détenteur ou l'opérateur qui collecte, et il doit notamment préciser les informations relatives aux contenants. La transmission électronique de ces données via Trackdéchets, si elle est effectuée dans les sept jours suivant la production ou l'expédition des déchets, dispense l'établissement de l'obligation de tenir et de conserver un registre papier, car les données sont alors directement accessibles et consultables via le "registre national des déchets". L'obligation de dématérialisation des BSDD pour les DASRIA était en cours de définition en 2023, signalant une extension progressive de cette pratique. L'article R1335-4 du Code de la santé publique spécifie également l'établissement de documents de suivi pour les DASRIA.

Responsabilité et sanctions liées à la traçabilitéLa responsabilité de l'établissement, en tant que producteur ou détenteur de déchets, s'étend de manière continue jusqu'à l'élimination ou la valorisation finale des déchets, même dans les cas où le déchet est transféré à un tiers à des fins de traitement. Il est de la responsabilité du producteur de s'assurer que la personne ou l'entité à qui les déchets sont remis est dûment autorisée et qualifiée pour les prendre en charge. Le non-respect des obligations de traçabilité est passible de sanctions. Par exemple, une amende de 750 € est prévue si le registre de traçabilité des déchets n’est pas tenu ou si l’établissement refuse de le mettre à disposition des autorités administratives lors d'un contrôle. Plus globalement, toute infraction aux obligations de tenue de registre, de transmission des informations, ou le refus de présenter les BSDD aux agents habilités, constitue une contravention de 4ème classe.

Le tri à la source et les "8 flux" : au cœur des obligations

Le tri à la source constitue une composante fondamentale de la gestion des déchets au sein des établissements de santé. Il impose la séparation des différents types de déchets dès leur point de production, afin de permettre leur traitement ou leur valorisation appropriée. Cette obligation est renforcée et systématisée par la mise en œuvre de la notion de "flux" de déchets.

L'évolution des "flux" de tri obligatoiresLa réglementation impose aux établissements de trier leurs déchets a minima en fonction de catégories spécifiques, appelées « flux ». Initialement basée sur cinq flux, cette obligation s'est progressivement étendue pour inclure davantage de matériaux :

  • Les « 5 flux » historiques : Ce sont les catégories de base que les établissements sont tenus de trier séparément. Elles comprennent le papier/carton, le métal, le plastique, le verre et le bois. Cette obligation est en vigueur pour les producteurs et détenteurs de déchets depuis le 1er juillet 2016. Le respect de ces flux permet une meilleure valorisation et un recyclage plus efficace des matériaux.
  • Les « 7 flux » : Aux cinq flux précédents s'ajoutent les fractions minérales et le plâtre, spécifiquement en cas de travaux de construction, de rénovation ou de démolition. Cette extension vise à gérer plus efficacement les déchets du bâtiment, souvent volumineux et spécifiques.
  • Les « 8 flux » : À partir du 1er janvier 2025, les textiles s'intégreront à cette liste, portant le nombre total de flux de tri obligatoires à huit. Cette évolution vise à renforcer la valorisation des textiles, notamment les uniformes, le linge de lit, ou d'autres produits textiles usagés des établissements.

Il est important de noter qu'en pratique, les biodéchets, les huiles alimentaires et les déchets dangereux sont également considérés comme des flux obligatoires supplémentaires, même s'ils ne sont pas explicitement inclus dans la dénomination "8 flux" telle que présentée par la source principale. Ils possèdent leurs propres réglementations de tri et de gestion spécifiques.

Obligation de collecte séparée pour les usagers et le personnelAu-delà du tri interne, les établissements ont une obligation cruciale de mettre à disposition du public et de leur personnel des dispositifs de collecte séparée pour certains déchets spécifiques. Sont concernés les papiers, cartons, acier, aluminium, plastiques et biodéchets. Cette mesure est essentielle pour encourager la participation de tous les acteurs présents dans l'établissement à la démarche de tri.Cette obligation s'applique à tous les établissements publics et privés de santé et médico-sociaux dont le volume de déchets totalise au minimum 1 100 litres par semaine, tous déchets confondus. Les articles D543-278 et D543-281 du Code de l'environnement confirment que le respect de cette règle valide l'obligation de collecte séparée pour les déchets générés par le public.

Le tri est crucial non seulement pour des raisons environnementales, mais aussi pour des considérations économiques et de sécurité. Il permet d'identifier les déchets dangereux (DD) des non dangereux (DND), évitant les mélanges potentiellement risqués, d'assurer la sécurité des personnes (personnel de soins, agents d'élimination) et de respecter les règles d'hygiène. De plus, un tri rigoureux permet de contrôler l'incidence économique de l'élimination des DASRIA, souvent coûteuse.

Rapport annuel de caractérisation et attestations de triLes établissements sont également soumis à l'obligation de produire un rapport annuel de caractérisation des déchets ainsi qu'une attestation d'obligation de tri. Ces documents sont d'une importance capitale pour attester du respect des obligations de tri et sont requis pour l'admission des déchets dans les installations de stockage. Les producteurs doivent démontrer que les déchets acheminés vers les installations de stockage de déchets non dangereux sont effectivement non valorisables, en justifiant cette caractérisation par le biais de ce rapport annuel, qui peut être délégué à l'exploitant de l'installation ou à un laboratoire compétent.

Sanctions en cas de non-respect du triLe non-respect des obligations de tri des déchets 8 flux peut entraîner des sanctions administratives significatives, pouvant aller jusqu’à 150 000 € d’amende. En outre, une mauvaise gestion générale des déchets, incluant des pratiques telles que les dépôts sauvages ou le recours à des organismes non agréés pour le traitement, est passible de peines d'emprisonnement pouvant atteindre quatre ans et d'une amende de 150 000 €. Ces mesures soulignent l'importance capitale que la réglementation accorde au tri à la source pour garantir la conformité et la protection de l'environnement.

Les déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés (DASRIA) : une gestion très spécifique

Les Déchets d’Activités de Soins à Risques Infectieux et Assimilés (DASRIA) constituent une catégorie de déchets particulièrement sensible, en raison des risques qu'ils peuvent présenter : infectieux, chimiques, toxiques, radioactifs ou mécaniques. Leur gestion est de ce fait soumise à une réglementation extrêmement rigoureuse, ayant pour objectif primordial de protéger les patients, le personnel de soins, les agents de collecte, et l'environnement dans son ensemble.

Définition et caractérisation des DASRIASelon l'article R.1335-1 du Code de la santé publique, les déchets d'activités de soins sont définis comme « les déchets issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif, dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire ». Sont spécifiquement considérés comme des DASRIA ceux qui:

  • Présentent un risque infectieux : Ils contiennent des micro-organismes viables ou leurs toxines, dont on a de bonnes raisons de croire qu'ils peuvent causer la maladie chez l'homme ou d'autres organismes vivants, en raison de leur nature, de leur quantité ou de leur métabolisme.
  • Même en l'absence de risque infectieux, relèvent de catégories spécifiques :
    • Matériels et matériaux piquants ou coupants destinés à être jetés, qu'ils aient été ou non en contact avec un produit biologique (par exemple, aiguilles, scalpels, lames, seringues avec aiguilles intégrées).
    • Produits sanguins à usage thérapeutique incomplètement utilisés ou arrivés à péremption.
    • Déchets anatomiques humains correspondant à des fragments humains non aisément identifiables (contrairement aux Pièces Anatomiques d'Origine Humaine ou PAOH, qui sont aisément identifiables et ont une filière d'élimination distincte, souvent via la crémation).

Par ailleurs, les déchets provenant d'activités d'enseignement, de recherche, de production industrielle en médecine humaine et vétérinaire, de thanatopraxie, de chirurgie esthétique, de tatouage par effraction cutanée, et d'essais cliniques ou non cliniques sur produits cosmétiques et de tatouage, sont également assimilables à des DASRIA s'ils répondent aux caractéristiques précitées.Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a apporté des précisions cruciales sur la caractérisation du risque infectieux. Un déchet est considéré à risques infectieux s'il provient d'un foyer infectieux avéré avec signes cliniques ou s'il est fortement imprégné de sang, sécrétions ou excrétions, avec un risque d'écoulement. Cette caractérisation, effectuée par le professionnel de santé, s'appuie sur une évaluation clinique et/ou un diagnostic microbiologique. En cas de doute ou d'impossibilité pratique de caractériser le risque, le déchet doit impérativement être classé comme DASRIA. Le soignant est d'ailleurs considéré comme le principal appréciateur du risque infectieux selon les recommandations du CLIN.

Modalités de gestion rigoureuses des DASRIALa gestion des DASRIA est soumise à des règles très strictes à chaque étape de leur cycle de vie:

  • Tri à la source : Il est impératif que les DASRIA soient triés immédiatement au point de production et séparés de tout autre déchet. Ils ne doivent en aucun cas être mélangés avec d'autres déchets pour éviter toute contamination ou risque supplémentaire.
  • Conditionnement et emballage : Ces déchets doivent être placés dans des contenants spécifiques et entreposés dans des conditions contrôlées. La collecte doit s'effectuer dans des emballages à usage unique, conformes aux normes NF, identifiables par leur couleur dominante jaune et un pictogramme de danger biologique. Ces emballages doivent être adaptés au type, à la taille et au volume des déchets, et permettre une fermeture provisoire puis définitive avant leur enlèvement. Des normes spécifiques existent pour divers types d'emballages : sacs en plastique (NF X 30-501), caisses en carton avec sacs (NF X 30-507), fûts et jerricans en plastique (NF EN ISO 23 907 et NF X 30-511), boîtes et minicollecteurs pour perforants (NF EN ISO 23 907 et NF X 30-511), et déchets liquides (NF X 30-506). Chaque emballage doit identifier le producteur de déchets et porter la mention "Déchets d'activités de soins à risques infectieux".
  • Entreposage : La durée maximale d'entreposage des DASRIA est strictement réglementée par l'arrêté du 7 septembre 1999 et varie en fonction de la quantité produite:
    • Quantité supérieure à 100 kg/semaine : 72 heures.
    • Quantité entre 15 kg/mois et 100 kg/semaine : 7 jours.
    • Quantité entre 5 kg/mois et 15 kg/mois : 1 mois.
    • Quantité inférieure ou égale à 5 kg/mois : 3 mois (avec une exception de 3 mois pour les DASRIA perforants uniquement).Ces délais incluent l'entreposage, le regroupement éventuel, le transport et le traitement final. Les locaux de stockage doivent être dédiés, équipés d'arrivée et d'évacuation d'eau, clairement identifiés, sécurisés (protection contre la dégradation, les vols, les intempéries, la chaleur, et les animaux), ventilés, éclairés, et dotés de sols et parois lavables. Il est formellement interdit de compacter, tasser ou congeler les DASRIA.
  • Traçabilité : Une traçabilité complète des DASRIA doit être assurée jusqu'à leur traitement final. L'article R1335-4 du Code de la santé publique impose l'établissement de documents de suivi à chaque étape de l'élimination.
  • Transport : Le transport des DASRIA est soumis à la réglementation des marchandises dangereuses, notamment l'Accord ADR et l'arrêté TMD du 29 mai 2009. Un conseiller à la sécurité pour le transport des matières dangereuses (CSTMD) est obligatoire pour les établissements qui expédient plus de 333 kg de DASRIA par expédition. Ce conseiller a pour rôle de veiller à la sécurité du transport, de la manutention, du stockage et de l'emballage de ces marchandises dangereuses.
  • Traitement final : Les deux seules modalités d'élimination des DASRIA autorisées par le Code de la santé publique sont l'incinération et le prétraitement par désinfection. Le prétraitement par désinfection, réalisé par des appareils spécifiques (dits banaliseurs), permet de rendre les déchets compatibles avec la filière des ordures ménagères. Sous certaines conditions réglementaires, ces déchets prétraités peuvent même être orientés vers une filière de valorisation matière et de recyclage. Cependant, le compostage est explicitement exclu pour les DASRIA en raison de leurs caractéristiques et de leur origine. L'arrêté du 20 avril 2017 encadre les modalités d'homologation et d'utilisation des appareils de prétraitement par désinfection.

Responsabilité et sanctionsToute personne qui produit des déchets d'activités de soins est tenue d'en assurer l'élimination. Cette obligation incombe directement à l'établissement de santé, à la personne morale pour le compte de laquelle un professionnel de santé exerce son activité, ou, dans d'autres cas, à la personne physique qui exerce à titre professionnel l'activité productrice de déchets. L'élimination peut être confiée à un tiers qualifié par le biais d'une convention écrite.Le non-respect du tri et de la collecte des DASRIA peut entraîner de lourdes sanctions administratives, pouvant aller jusqu’à 150 000 € d’amende. De plus, une mauvaise gestion générale des déchets, incluant les dépôts sauvages ou le recours à un organisme non agréé, est passible de quatre ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.

Un guide national sur l'élimination des DASRIA, dont la version 2009 est en cours de mise à jour (avec une nouvelle édition prévue pour 2025), vise à harmoniser les pratiques de tri à l'échelle nationale pour mieux répondre aux enjeux climatiques tout en garantissant la protection des professionnels et du public tout au long de la chaîne. Cette révision est le fruit d'un travail collaboratif impliquant la direction générale de la santé (DGS), la direction générale de l'offre de soins (DGOS), des professionnels de la collecte et du traitement des déchets, des fédérations hospitalières, des sociétés savantes et des agences régionales de santé.

Les autres déchets dangereux : identification et filières dédiées

Au-delà des Déchets d'Activités de Soins à Risques Infectieux et Assimilés (DASRIA), les établissements de santé génèrent une diversité d'autres catégories de déchets dangereux. Ces déchets requièrent une gestion spécifique et rigoureuse en raison de leurs propriétés intrinsèques, telles que la toxicité, l'inflammabilité, la corrosivité ou la radioactivité. Leur présence est signalée par un astérisque dans la liste des déchets classifiés, et ils doivent impérativement faire l'objet d'un tri et d'un traitement adaptés.

Définition et typologie des déchets dangereux (hors DASRIA)Un déchet dangereux est défini par la possession d'une ou plusieurs propriétés de danger. Il est impératif que les établissements trient ces déchets à la source et les séparent de tout autre déchet non dangereux. Parmi les types de déchets dangereux fréquemment rencontrés en milieu hospitalier, en dehors des DASRIA, figurent:

  • Déchets chimiques dangereux (DECHID) : Cette catégorie englobe une large gamme de substances et de produits. On y trouve notamment certains produits d'entretien professionnels, des produits à base d'hydrocarbures, diverses peintures, des produits d'adhésion, d'étanchéité et de réparation, des produits de revêtement, des produits d'entretien spéciaux et de protection, des produits chimiques usuels (tels que les acides ou les bases), des solvants et diluants, des produits biocides et phytosanitaires ménagers, ainsi que des encres et cartouches d'impression. La manipulation et le stockage de ces déchets sont strictement encadrés par des réglementations spécifiques, incluant le Code du travail et les règlements européens CLP (Classification, Labelling and Packaging) et REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals). Il est essentiel de limiter les quantités de ces produits stockées, d'identifier clairement tout produit reconstitué (en indiquant son nom, son pictogramme de danger et les mentions de danger), et de les stocker dans des locaux sécurisés. Ces locaux doivent être équipés de bacs de rétention, d'une ventilation adéquate, d'une séparation des produits chimiques incompatibles, et de dispositifs de sécurité incendie appropriés.
  • Médicaments non utilisés (MNU) et cytotoxiques : Les médicaments non utilisés, y compris certains produits spécifiques comme les déchets d’amalgames dentaires, les piles, et les cartouches d'impression, sont classés comme déchets dangereux. Les médicaments anticancéreux, par exemple, bien qu'ils puissent être conditionnés et collectés en mélange avec les DASRIA, sont soumis à des dispositions et arrêtés spécifiques pour leur gestion. Les MNU rapportés par les ménages sont généralement pris en charge par l'éco-organisme Cyclamed, et des réflexions sont en cours pour étendre l'activité de cet éco-organisme aux déchets similaires produits par les établissements de santé.
  • Déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE ou D3E) : Cette vaste catégorie comprend les lampes, ampoules (hors à filament), néons, écrans, moniteurs, panneaux photovoltaïques, cycles à pédalage assisté, trottinettes, ainsi que tous les petits et gros équipements électriques et électroniques. Les DEEE contiennent fréquemment des composants et substances dangereuses (telles que les accumulateurs, les cartes de circuits imprimés ou les tubes cathodiques). Cependant, ils présentent également un fort potentiel de recyclage pour des matériaux comme le plastique et les métaux. Leur gestion est régie par les articles R543-172 et suivants du Code de l'environnement. Les piles et accumulateurs, bien que faisant partie des DEEE, ont une réglementation et des filières de collecte spécifiques.
  • Amalgames dentaires : L'élimination des déchets d'amalgame issus des cabinets dentaires est une obligation légale, et doit se faire via des filières spécifiques. L'installation de séparateurs d'amalgame est requise pour empêcher le rejet de résidus dans le réseau des eaux usées.
  • Déchets radioactifs : Bien qu'ils ne fassent pas l'objet d'une section dédiée et détaillée dans les sources fournies, les déchets dangereux à risques radioactifs sont mentionnés comme une filière de gestion spécifique. Il est précisé que pour les déchets radioactifs qui relèvent également du régime des DASRIA ou des pièces anatomiques, seules les dispositions du Code de la Santé Publique leur sont applicables.
  • Huiles techniques : À distinguer des huiles alimentaires usagées, les huiles minérales ou synthétiques usagées (provenant des moteurs, turbines, systèmes hydrauliques, engrenages, etc.) doivent faire l'objet d'une collecte séparée des autres déchets. Un bon d'enlèvement doit être émis à chaque collecte, et une traçabilité rigoureuse est obligatoire pour cette filière.

Exigences de gestion pour tous les déchets dangereuxPour l'ensemble de ces catégories de déchets dangereux, il est impératif qu'ils fassent l’objet d’un emballage/conditionnement et, dans certains cas, d’un étiquetage spécifique et clair. Ils doivent également faire l’objet d’une collecte adaptée et séparée qui garantit qu’ils ne sont pas mélangés avec d'autres filières de traitement, afin de prévenir tout risque de contamination croisée ou de danger. Leur manipulation nécessite souvent l'utilisation d'équipements de protection individuelle (EPI) et collective (EPC) appropriés pour la sécurité du personnel.

SanctionsLe non-respect du tri et des modalités de gestion des déchets dangereux est sévèrement sanctionné. Il peut entraîner des sanctions administratives pouvant aller jusqu’à 150 000 € d’amende. De surcroît, une mauvaise gestion générale des déchets, comme des dépôts sauvages ou le recours à un organisme non agréé, est passible de quatre ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende. Ces sanctions soulignent la gravité des risques associés à ces déchets et l'importance cruciale d'une gestion conforme et sécurisée.

Les biodéchets et huiles alimentaires usagées : valorisation et enjeux environnementaux

La gestion des biodéchets et des huiles alimentaires usagées (HAU) représente un volet stratégique majeur dans la démarche de réduction et de valorisation des déchets au sein des établissements de santé, particulièrement ceux équipés de restaurants collectifs. Ces filières, constamment adaptées par la réglementation, visent à favoriser l'économie circulaire en transformant ces flux de déchets en ressources valorisables.

Obligations réglementaires relatives aux biodéchetsLa législation sur les biodéchets a connu des évolutions significatives. Depuis le 1er janvier 2023, les entités produisant ou détenant plus de 5 tonnes de biodéchets par an sont soumises à l'obligation d'assurer leur collecte séparée en vue de leur valorisation. Cette obligation a été étendue à tous les producteurs et détenteurs de biodéchets, y compris les établissements privés et publics, à partir du 31 décembre 2023.

Les biodéchets sont définis de manière large, incluant « les déchets non dangereux biodégradables de jardin ou de parc, les déchets alimentaires et de cuisine provenant des ménages, des bureaux, des restaurants, du commerce de gros, des cantines, des traiteurs ou des magasins de vente au détail, ainsi que les déchets comparables provenant des usines de transformation de denrées alimentaires ».

Les restaurants collectifs, quelle que soit la quantité de biodéchets qu'ils produisent, sont spécifiquement tenus d'organiser leur tri à la source et leur valorisation. Trois principales modalités de valorisation sont permises par la réglementation:

  • Compostage sur site : Les établissements ont la possibilité d'installer un système de compostage de proximité, sous réserve de respecter certaines conditions. Cette option est envisageable si le volume des biodéchets traités sur place ne dépasse pas 1 tonne par semaine. Cela favorise une gestion locale et réduit les besoins de transport.
  • Collecte par un prestataire externe : Faire appel à un professionnel agréé spécialisé dans la collecte et le traitement des biodéchets est une solution courante pour les établissements. Le prestataire assure alors l'acheminement des biodéchets vers des installations de méthanisation ou de compostage industriel.
  • Don à une association animale agréée : Une option de valorisation moins conventionnelle mais encouragée est le don des biodéchets à une association animale agréée. Cette démarche doit être soumise à l'agrément de la direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP).

Par ailleurs, dans une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire, les restaurants collectifs qui produisent plus de 3 000 repas par jour sont dans l'obligation de conclure une convention de don de produits consommables avec une ou plusieurs associations habilitées à l'aide alimentaire. Cette mesure permet de redistribuer les surplus alimentaires encore consommables, évitant ainsi leur transformation en déchets.

Gestion des huiles alimentaires usagées (HAU)En parallèle des biodéchets, les huiles alimentaires usagées (HAU) font l'objet d'une réglementation spécifique. Les restaurants collectifs qui génèrent plus de 60 litres d’huiles alimentaires par an sont tenus de les collecter séparément en vue de leur valorisation. Bien que les huiles usagées soient classifiées comme des déchets dangereux, elles disposent d'une filière de gestion distincte de celle des autres huiles techniques, souvent gérée via des éco-organismes.

Interdiction de brûlage et exigences de déconditionnementLe brûlage des biodéchets est généralement interdit, sauf en cas de dérogation préfectorale exceptionnelle. Un point crucial de la réglementation est l'obligation de déconditionner les biodéchets lorsqu'ils sont contenus dans des emballages non compostables, non méthanisables ou non biodégradables, avant leur valorisation. Cependant, certaines exceptions sont prévues : les sacs de collecte en papier, carton, ou même en plastique répondant à la norme EN13432 ou équivalente, ainsi que certaines capsules de café, filtres à café en papier et sachets de thé, peuvent faire l'objet d'une collecte conjointe avec les biodéchets. Une tolérance pour les sacs en plastique conformes à la norme EN13432 est maintenue jusqu'au 31 décembre 2024 pour les marchés antérieurs.

Sanctions applicablesLe non-respect des obligations relatives à la gestion des biodéchets et des huiles alimentaires usagées peut entraîner des sanctions administratives significatives, pouvant aller jusqu'à 150 000 € d'amende. De plus, une mauvaise gestion générale des déchets, comme des dépôts sauvages ou le recours à un organisme non agréé, est passible de quatre ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende. Ces sanctions soulignent l'importance accordée à ces filières dans la transition écologique et la réduction de l'empreinte environnementale des établissements de santé.

La gestion des déchets issus de travaux et la lutte contre le plastique à usage unique

Les établissements de santé se trouvent confrontés à deux autres défis majeurs et distincts en matière de gestion des déchets : d'une part, les volumes importants générés par les travaux de construction, rénovation ou démolition de leurs infrastructures, et d'autre part, l'impératif croissant de réduire drastiquement l'utilisation du plastique à usage unique. Ces deux domaines sont soumis à des réglementations spécifiques, toutes orientées vers la minimisation de leur impact environnemental.

Les déchets issus de travaux de bâtimentLors de l'engagement de projets de démolition ou de rénovation lourde, les établissements de santé sont assujettis à des obligations précises concernant la gestion des déchets qui en découlent.

  • Diagnostic préalable et obligatoire : Avant le début des travaux, l’établissement doit impérativement réaliser un diagnostic de sa gestion des déchets. Ce diagnostic, prévu par l'article L126-34 du Code de la construction et de l’habitation, doit être établi par des personnes compétentes. Son objectif principal est de déterminer les modes de réemploi ou de valorisation les plus appropriés pour les produits, matériaux et déchets envisagés, en identifiant spécifiquement les filières de recyclage adaptées. Cela permet une planification amont de la gestion des déchets pour maximiser leur valorisation.
  • Mentions obligatoires dans les devis : Les entreprises du bâtiment chargées des travaux (construction, rénovation, démolition, et même jardinage) sont tenues d'inclure dans leurs devis des informations détaillées concernant les modalités d’enlèvement et de gestion des déchets produits. Cela inclut les coûts associés à cette gestion et les installations prévues pour leur traitement. Cette exigence vise à assurer une transparence et une planification adéquate de la gestion des déchets dès la phase contractuelle.
  • Délivrance d'un bordereau de suivi des déchets : Une fois les travaux réalisés, l’entreprise doit délivrer un bordereau de suivi des déchets à l’établissement. Ce document est essentiel pour la traçabilité des déchets du bâtiment et pour garantir la conformité de leur élimination.

En cas de manquement de la part des entreprises du bâtiment aux obligations mentionnées dans les devis, des sanctions financières de 3 000 € à 15 000 € d’amende peuvent être appliquées.

La suppression des déchets plastiques à usage uniqueLes établissements de santé sont également des acteurs clés dans la lutte contre la pollution plastique, avec des directives claires visant à réduire considérablement l'usage des plastiques à usage unique.

  • Interdiction des ustensiles en plastique et des bouteilles d'eau gratuites : Il est désormais obligatoire pour les établissements de supprimer l'utilisation d'ustensiles en plastique tels que les couverts, assiettes, gobelets, et leurs couvercles. De même, la distribution gratuite de bouteilles d’eau en plastique est interdite. Le non-respect de cette dernière interdiction peut entraîner une amende de 450 €.
  • Mise à disposition de fontaines à eau : Pour pallier l'interdiction des bouteilles d'eau jetables, les établissements doivent prévoir l'installation d'au moins une fontaine à eau dans leurs locaux. Le nombre de fontaines requises est proportionnel à la capacité d’accueil de la structure, avec une recommandation d'une fontaine pour 300 personnes accueillies (hors personnel). L'absence de ces fontaines peut être sanctionnée par une amende de 1 500 €.
  • Contenants réutilisables ou recyclables pour la vente à emporter : Les restaurants collectifs sont désormais tenus de proposer des contenants réutilisables (en verre, céramique, inox, etc.) ou fabriqués à partir de matières recyclables pour toutes les ventes à emporter.
  • Restrictions spécifiques dans certains services sensibles : Les services de pédiatrie, d’obstétrique, de maternité, de protection maternelle et infantile (PMI), ainsi que les centres périnataux de proximité, doivent impérativement cesser l'utilisation de contenants alimentaires en plastique (y compris les plastiques biodégradables, biosourcés, compostables, vernis, ou avec couches d'étanchéité) pour la cuisson, le réchauffage et le service des repas. Des dérogations peuvent exister dans des cas précis.
  • Vaisselle réutilisable pour les repas consommés sur place : Pour les restaurants ayant la capacité d'accueillir au moins 20 personnes simultanément, il est obligatoire de remplacer la vaisselle jetable par des alternatives réutilisables pour tous les repas consommés sur place.

Ces mesures, qui sont déjà en vigueur, s'inscrivent dans une démarche globale de réduction de la consommation de ressources et de promotion du réemploi. Elles contribuent activement à la prévention de la production de déchets et à la protection de l'environnement, en cohérence avec les principes fondamentaux de la gestion des déchets.

Responsabilités, sanctions et le rôle clé des filières REP et de la prévention

La gestion des déchets en établissements de santé est sous-tendue par un principe juridique fondamental : la responsabilité étendue du producteur ou du détenteur, qui s'étend de la phase de production du déchet jusqu'à son élimination finale. Ce principe est renforcé par un système de sanctions rigoureuses en cas de non-conformité et est complété par le rôle grandissant des filières à Responsabilité Élargie du Producteur (REP) et des initiatives de prévention des déchets.

Responsabilité du producteur/détenteur de déchetsLe Code de l’environnement, via son Article L541-2, énonce clairement que le producteur ou le détenteur de déchets est entièrement responsable de leur gestion jusqu'à leur élimination ou valorisation finale. Cette responsabilité est inaliénable et demeure effective même lorsque le déchet est transféré à un tiers à des fins de traitement. Il incombe ainsi au producteur de s’assurer, de manière diligente, que la personne ou l'organisme à qui il remet les déchets est dûment autorisée et compétente pour les prendre en charge. Cette obligation de responsabilité s'applique de manière spécifique aux déchets d'activités de soins (DAS), comme le stipule l'article R1335-2 du Code de la santé publique. Les entités productrices de déchets, qu'il s'agisse d'établissements de santé, d'établissements d'enseignement ou de recherche, d'établissements industriels, de personnes morales au nom desquelles un professionnel de santé exerce, ou de personnes physiques exerçant à titre professionnel l'activité productrice de déchets, sont toutes soumises à cette obligation d'élimination.

Les sanctions en cas de non-conformitéLe non-respect des règles établies pour la gestion des déchets peut entraîner des sanctions très lourdes, de nature administrative et pénale.

  • Sanctions pénales : Des peines d'emprisonnement et des amendes substantielles sont prévues pour les infractions graves. Par exemple, l'abandon de déchets, la remise de déchets à une installation non agréée, ou le transfert illégal de déchets sans notification ou consentement préalable des autorités compétentes (françaises ou étrangères) peuvent être passibles de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende (Articles L541-46 et 48 du Code de l'environnement). Ces dispositions s'étendent également aux gestionnaires qui auraient failli à leurs obligations et laissé ces règles être méconnues. Le conseiller à la sécurité pour le transport des matières dangereuses peut être passible d'une peine allant jusqu'à 1 an d'emprisonnement et 30 000 € d'amende.
  • Sanctions administratives :
    • Non-respect du tri des déchets des « 8 flux » : une amende pouvant atteindre 150 000 €.
    • Non-respect du tri des déchets dangereux (hors DASRIA) : une amende pouvant aller jusqu'à 150 000 €.
    • Non-respect du tri et de la collecte des DASRIA : une amende pouvant s'élever jusqu'à 150 000 €.
    • Non-respect de la gestion des biodéchets et des huiles alimentaires usagées : une amende pouvant atteindre 150 000 €.
    • Absence de tenue du registre de traçabilité des déchets ou refus de le mettre à disposition des autorités : une amende de 750 €.
    • Distribution gratuite de bouteilles en plastique : une amende de 450 €.
    • Absence de fontaines à eau obligatoires : une amende de 1 500 €.
    • Manquement aux obligations prévues dans le devis pour les entreprises du bâtiment concernant la gestion des déchets de travaux : une amende variant de 3 000 € à 15 000 €.

Ces sanctions, pour la plupart déjà en vigueur, témoignent de la vigilance accrue des autorités et de l'importance capitale accordée à une gestion rigoureuse et conforme des déchets dans le secteur de la santé.

Les filières à Responsabilité Élargie du Producteur (REP)Les filières REP constituent des dispositifs d'organisation essentiels pour la prévention et la gestion de certains types de déchets. Elles reposent sur le principe fondamental que les producteurs, importateurs et distributeurs de produits sont tenus pour responsables de la gestion des déchets qui résultent de ces produits et doivent y contribuer, notamment financièrement.Ce mécanisme est concrétisé par l'intermédiaire d'éco-organismes, qui sont des structures de droit privé, à but non lucratif, créées par les producteurs eux-mêmes. Ces derniers versent une "éco-contribution" à ces organismes, souvent répercutée sur le consommateur (indiquée par "dont éco-part."). En échange de cette contribution, les éco-organismes ont pour mission d'organiser la collecte et le traitement des déchets concernés. Recourir à un éco-organisme permet ainsi non seulement de mieux valoriser le déchet, mais aussi d'éviter de payer une seconde fois pour son élimination, le coût ayant déjà été intégré au prix d'achat initial du produit.De nombreuses filières REP concernent directement les établissements de santé, notamment pour:

  • Les emballages ménagers
  • Les papiers
  • Les déchets d’équipements électriques et électroniques (D3E), pour lesquels des éco-organismes tels qu'Ecologic, Ecosystem, Screlec, Corepile et Soren (pour les panneaux photovoltaïques) sont agréés.
  • Les éléments d’ameublement (DEA), avec Eco-mobilier et Valdelia comme éco-organismes.
  • Les textiles
  • Les piles et accumulateurs, gérés par des organismes comme Corepile et Screlec.
  • Les produits chimiques (DDS), pris en charge par EcoDDS et Ecosystem.
  • Les pneumatiques et les véhicules hors d'usage
  • Les produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment
  • Les huiles minérales ou synthétiques, pour lesquelles Cyclevia est l'éco-organisme dédié.
  • Les emballages utilisés par les professionnels de la restauration (obligation depuis le 1er janvier 2023).
  • Les textiles sanitaires à usage unique (obligation à partir du 1er janvier 2024).

Il est à noter que, si les médicaments à usage humain non utilisés (MNU) rapportés par les ménages sont couverts par Cyclamed, des discussions sont en cours pour étendre cette activité aux MNU générés par les établissements de santé.

La prévention des déchets et l'importance du donAu-delà du tri et des traitements, la prévention de la production de déchets constitue le premier et le plus fondamental objectif de la hiérarchie des modes de traitement. Cette prévention englobe des initiatives cruciales telles que le don, qui permet d'éviter que des produits encore utilisables ne deviennent des déchets.

  • Le don de repas non consommés : L’article L541-15-5 du Code de l’environnement interdit formellement de rendre impropres à la consommation les invendus alimentaires qui sont encore consommables. Les grands opérateurs de la restauration collective, définis comme ceux préparant plus de 3 000 repas par jour, sont même soumis à l'obligation de conclure une convention de don de denrées alimentaires avec une ou plusieurs associations habilitées. Toutefois, des catégories alimentaires spécifiques, notamment d'origine animale, peuvent être exclues du don pour des raisons de risque sanitaire, à moins que le plan de maîtrise sanitaire de l'établissement n'autorise explicitement leur don et qu'elles soient correctement conditionnées et étiquetées avec leur date limite de consommation.
  • Le don de matériels médicaux : Les établissements de santé ont la possibilité légale de céder à titre gratuit du matériel médical à des associations ou à des structures de l’économie sociale et solidaire agréées. Ces entités ont pour mission de reconditionner ce matériel, développant ainsi des activités de préparation à la réutilisation et au réemploi. Un décret est en cours de rédaction pour préciser les modalités d'application de cette mesure. Des initiatives comme le "Bon coin du CHU", un lauréat du Prix FHF TES 2022 pour sa plateforme d'échange de matériel et de mobilier, illustrent parfaitement comment ces dons peuvent favoriser l'économie circulaire et réduire significativement le volume de déchets.

Ces approches proactives sont essentielles pour une gestion des déchets qui dépasse la simple élimination, en cherchant à valoriser les ressources et à réduire la production de déchets à la source.

Conclusion :

La gestion des déchets dans les établissements de santé est un domaine d'une complexité croissante et en perpétuelle évolution, guidé par une réglementation exigeante et une conscience environnementale de plus en plus marquée. Des principes fondamentaux de prévention et de valorisation à la traçabilité rigoureuse, en passant par le tri à la source et la gestion spécifique de chaque flux de déchets, chaque étape est cruciale pour garantir la protection de la santé publique et de l'environnement.

Les obligations de tri des "8 flux", la gestion minutieuse des Déchets d'Activités de Soins à Risques Infectieux et Assimilés (DASRIA), des autres déchets dangereux, des biodéchets et des plastiques à usage unique, ainsi que la conformité pour les déchets issus de travaux, illustrent la diversité et l'ampleur des défis auxquels les établissements sont confrontés au quotidien. La dématérialisation des bordereaux de suivi via des plateformes comme Trackdéchets simplifie et sécurise la traçabilité, tandis que le développement des filières à Responsabilité Élargie du Producteur (REP) et des initiatives de don encourage une économie plus circulaire et résiliente.

La responsabilité du producteur est primordiale à chaque étape du cycle de vie des déchets, et le non-respect de ces règles peut entraîner de sévères sanctions, tant administratives que pénales. En définitive, une gestion proactive, éclairée et rigoureusement conforme des déchets n'est pas seulement une obligation légale pour les établissements de santé ; elle est une composante essentielle de leur performance globale, de leur image institutionnelle et de leur contribution active à un avenir plus durable. Les mises à jour continues des guides et réglementations témoignent de l'engagement constant des autorités à affiner les pratiques pour un impact toujours plus positif et une meilleure protection des écosystèmes et de la santé humaine.

Sources :

https://sante.gouv.fr/soins-et-maladies/qualite-securite-et-pertinence-des-soins/securite-des-prises-en-charge/reglementation-de-securite-sanitaire-dans-les-etablissements-de-sante/article/elimination-des-dechets-d-activites-de-soins-a-risque-infectieux

https://www.cpias-ile-de-france.fr/docprocom/animation/ems/Ehpad031018/Michel.pdf

https://anap.fr/sfc/servlet.shepherd/document/download/069Jv000008jzm6IAA

https://www.fhf.fr/sites/default/files/2023-03/Note_Trans_Eco_Dechets5.pdf

photo de l'auteur de l'article du blog de la safeteam academy
Frédéric MARTIN
Fondateur de la SafeTeam Academy
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